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Collection : Francis MARSHALL

Francis Marshall est né en 1946 à La Frette-sur-Seine.
Titulaire d’un CAP de sculpteur sur bois. Artiste hors les normes dès 1969 : création de plus de 400 bourrages, sculptures de tissus, de ficelles et de bois. Découvert par Alain Bourbonnais, collectionneur d’Art Brut et ami du peintre Jean Dubuffet, il expose ses bourrages en 1973 à l’atelier Jacob à Paris, au musée d’Art Moderne de la ville de Paris en 1978 et à Londres en 1979 à la Hayward Gallery.
Il crée l’héroïne «Mauricette» exposée à la Fabuloserie, musée d’Art Brut dès 1983.
A partir de 1986, il produit 250 sculptures bourrées avec tables, chaises, buildings, trains, sarcophages, placards et vélos. Dans les années 1990, il réalise plus de 150 peintures avec cadres et écritures. En 1996, il commence à enfermer des peintures dans des placards. En 2009, il conçoit le « Château de la Solitude » avec pavillons attenants (bourrages avec peintures).
Francis Marshall a enseigné à l’école d’Art du Havre de 1977 à 2014.

Francis MARSHALL, Château de la solitude, installation, Musée Art et Déchirure




Notice du catalogue du Festival Art et Déchirure 2017 :

“Le train 31425 s’est arrêté à Sotteville-lès-Rouen, il est sorti de ses rails. Francis Marshall l’a mis en panne. Marshall aime les histoires ; il aime les lettres de réclamations, les chefs de gare, la sexualité rurale, l’heure de la soupe, les gens qui attendent, les maisons abandonnées, les voyages en train, etc. Plusieurs wagons sont immobilisés devant des maisons abandonnées, une stèle en forme de pagode côtoie une salle d’attente et un totem flanqué de hachettes. Tout un amalgame de matériaux patiné par le temps, le soleil et la pluie, est posé là, progressivement sorti de son atelier à ciel ouvert proche de sa maison familiale. Un bourrage oublié de ses truculents personnages s’est trouvé associé à une peinture rappelant les soins médicaux dans un collège de jeunes filles, puis des enfants trouvés sont alignés dans une salle d’attente improbable qui forme une sorte d’inventaire de différentes séries. Ce chemin de fer devant ces drôles de personnages  assemblés avec des portes et autres objets sculptés constituent autant d’images d’un monde désuet et attachant ; Cet embryon de rétrospective, ordonnée par l’artiste en trieur en chef soucieux des associations et des matériaux utilisés, nous invite à découvrir un univers singulier, sensible et figuré, parcouru d’une matière biographique exaltée, détournée et recomposée.
Fils de cheminot, enseignant il y a plus de quarante ans au Collège technique de Pont-Audemer, Francis Marshall rejoignait chaque jour en Solex la longère qu’il habitait au lieu-dit « Le bout des haies » à Trouville-la-Haule, en surplomb de la Seine aux confins de l’Eure. C’est là qu’il a commencé au début des années soixante-dix sa série de « Mauricette » en bourrant des bas avec des chiffons trouvés chez Cléroult, le ferrailleur du coin. Mauricette représentait l’archétype des jeunes filles de la campagne, celles qui prennent le car pour aller à l’école apprendre à coudre et à cuisiner, affublées de leur blouse réglementaire en nylon rose. Traitées avec des physiques ingrats qui renvoient autant aux rudes conditions de la vie en campagne l’hiver dans le froid et la boue qu’à la physionomie de personnages mal habillés, mal soignés et mal nourris, les personnages de Marshall déclinent, non sans poésie et humour, une série de moments choisis d’un univers familial et social frustre : les enfants figés dans leur siège, contraint dans leur condition. Ces sculptures bricolées, souvent dégradées par leur longue exposition à la pluie et au vent ce qui en accentue la fragilité matérielle et existentielle, incarnent une généalogie imaginaire à travers les postures sociales, les allusions sexuelles ou les frictions entre générations ; elles portent des écriteaux indiquant leur raison sociale, sexuée, toponymique ou chronologique. Tel Enfant aux oiseaux, Château de la solitude, Salle d’attente ou telle Maison abandonné (région de Belbeuf) résonnent comme autant d’échos plus ou moins biographiques où l’artiste s’identifie aux « petites gens » selon l’expression consacrée ; ces gens-de-peu mal fagotés aux goûts simples, toujours démodés ; ceux des dispensaires et des salles d’attente venus montrer leurs maladies bénignes ou peu avouables ; ceux des faits divers, amputés de la vie aux physiques ingrats, aux environnements abîmés et aux désirs inassouvis qui rêvent cependant de nouveautés, de voyages lointains et d’aventures sentimentales. Il y a beaucoup de tendresse chez Marshall pour ses personnages, leurs meubles et leurs décors, souvent grotesques mais terriblement humains. En même temps, il n’est pas dupe, derrière les clichés sociaux et conformistes pointent souvent les désirs secrets, les projets contrariés, les rêves inaboutis où chacun peut se reconnaître !
Les peintures qu’il réalise depuis une vingtaine d’année prolongent cet univers où nous sommes invités à toutes les curiosités. Des personnages semblant directement issus d’anciens magazines illustrés ou de romans-photos apparaissent aux fenêtres des wagons ou posent devant des paysages stéréotypés dont le coucher de soleil constitue l’archétype. Chaque fois la peinture est impeccable, claire et précise, alternant aplats et modelés dans une fine couche de couleurs.
Les objets peints ou fabriqués par Francis Marshall sont des présences affirmées, ils renvoient à travers des postures ou des types sociaux aux mythologies familiales et collectives qui jalonnent chacune de nos existences.”


RIEN QUE DES HISTOIRES DE FOUS – ENTRETIEN AVEC FRANCIS MARSHALL SOUS LE VENT DE L’ART BRUT.
Un film de Hervé DELAMARE. 1h 06 mn / 16 : 9 HD / 2019 / Documentaire.
Si l’Art Brut est encore peu connu du grand public, il est au cœur du parcours d’un artiste qui depuis plus d’une cinquantaine d’années est l’une des figures internationales sous son vent : Francis Marshall. Entre décomposition et fertilité, ses objets qu’il nomme les Rembourrés, nous vengent un peu de nos règles éducatives et sociales. Un univers parodique aux confins de l’humour noir, du politiquement incorrect, de l’anti-commercial. Au fil d’un entretien haut en couleur, l’artiste nous raconte les jalons de son parcours jusqu’à sa participation au nouveau musée normand Art et Déchirure, sans compter son implication durant 37 ans en tant qu’enseignant à l’école d’art du Havre.

C’est cet ensemble de témoignages qu’Hervé Delamare, l’un de ses anciens élèves, recueille un après midi de novembre à L’Atelier du Mulet. Le film évoque également des facettes oubliées d’une histoire de l’art incisive. Car si l’Art Brut bouscule joyeusement les repères culturels des années soixante – soixante dix, d’autres mouvements artistiques sont visiblement eux aussi, les folles conséquences d’enjeux qui les dépassent.

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